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VOYAGE À VÉNUS

qui ont toute l’ardeur du noviciat mais généralement plus de prétention que de clientèle, causent et discutent dans la grande salle, à la bibliothèque, dans les couloirs, partout, en un mot où ils peuvent former un groupe de deux ou trois… ils ne sauraient être davantage : lorsqu’ils sont trois, il y en a déjà deux qui parlent à la fois.

« Quant à ceux qui ont la chance de plaider, ils s’en donnent à cœur joie, et trouvent moyen de parler pendant deux heures dans une affaire qu’on pourrait expliquer en vingt minutes. Les causes qu’ils défendent sont souvent contradictoires, seule l’ardeur de leur conviction ne varie jamais. Je les appellerais volontiers des condensateurs d’éloquence, qui, sur une question en litige, s’électrisent positivement ou négativement, selon qu’ils ont été mis en communication avec le demandeur ou avec le défendeur ; et, comme il arrive à l’égard de la bouteille de Leyde, cet autre condensateur, l’or joue un grand rôle pour accroître leur énergie.

« Fréquemment, ils croient devoir s’irriter, s’indigner, et alors il faut les voir crier et tempêter ! c’est une véritable éruption oratoire : tantôt leur poing crispé frappe la barre, tantôt leurs deux bras s’élèvent et déploient la large envergure de leurs manches comme des ailes de chauve-souris ; puis,