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VOYAGE À VÉNUS

— Je ne pense pas que nos artistes aient voulu se repaître d’une pareille illusion ; je crois plutôt qu’ils espèrent que les bravos des claqueurs entraîneront ceux du public. Et pourtant, le contraire arrive plus souvent, car bien des spectateurs, disposés à manifester leur satisfaction, éprouvent une certaine répugnance à faire chorus avec ces gagistes de l’enthousiasme.

« Si encore les malheureux se bornaient à applaudir ! mais ils s’égosillent en vociférations, et prodiguent les rappels, — quand on y met le prix. Rien, au reste, n’est plus nuisible à l’illusion théâtrale que ces tapageuses ovations à la fin de chaque scène à effet, ces brusques interruptions du spectacle causées par l’apparition d’une actrice qu’on a vue, à l’instant, ruisselante de larmes ou crispée de fureur, et qui vient, calme et souriante, se rendre au rappel qu’elle s’est fait adresser et remercier, d’un salut gracieux, la cohorte romaine pour des applaudissements dont elle connaît le tarif. Quelquefois, afin de compléter son triomphe, et lorsqu’elle est assez riche pour payer tant de gloire, elle se fait lancer des galeries supérieures une pluie de gros bouquets.

Mélino rit beaucoup de ces usages que nos mœurs ont si bien acceptés.