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VOYAGE À VÉNUS

thique tous les sentiments de leur rôle, sans jamais cesser d’être suave et mélodieuse. Elle était accompagnée, et, pour ainsi dire, caressée, par un excellent orchestre qui en doublait le charme, comme le vague murmure d’une forêt fait ressortir le chant perlé du rossignol. Quelle différence avec nos établissements lyriques, où l’orchestre rageur, loin de soutenir l’acteur, paraît vouloir engager avec lui un duel de sonorité ! Combien de voix charmantes, ce minotaure des chanteurs et des chanteuses n’a-t-il pas dévorées ? Et pourtant, oublieuses des cruelles leçons du passé, les victimes du monstre aux cent bouches hurlantes, semblent prendre plaisir à cette lutte inégale, et c’est à qui abordera d’assaut les notes les plus inaccessibles. Elles y sont malheureusement encouragées par ces prétendus dillettanti qui, dans nos théâtres lyriques, étalent leur prétentieuse nullité, et se répandent en bravos frénétiques chaque fois qu’éclate une de ces notes transcendantes qui ne sont que des cris aigus, chaque fois encore que l’artiste, se livrant à des exercices de pyrotechnie lyrique, fait jaillir de son larynx ces fusées d’arpèges et de trilles, qui n’ont d’autre charme que celui d’un pénible tour de force plus ou moins heureusement accompli.

Dans l’art chorégraphique, j’admirai combien