Page:Eyraud - Voyage à Vénus.djvu/113

Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
VOYAGE À VÉNUS

« Ce fanatisme du passé et ce dédain du présent sont d’autant plus injustes et cruels qu’un ouvrage ne gagne rien à vieillir, et qu’il a toute sa valeur au moment même où il sort des mains de son auteur. S’inspirant des préoccupations du moment, il est l’écho des cœurs honnêtes et des esprits droits en présence des vices et des ridicules contemporains ; plus tard, ces vices et ces ridicules disparaissent, ou plutôt se métamorphosent, et la pièce éventée n’a qu’un intérêt rétrospectif et qu’un pâle succès. Elle est comme la fleur qui puise sa substance dans le sol et dans l’atmosphère qui l’entourent : dès qu’elle n’a plus rien à leur demander et que sa corolle a tout son éclat et tout son parfum, elle languit, se fane, et ne peut plus être conservée que dans ces funèbres albums de fleurs desséchées — anciens répertoires des jardins, — qu’on appelle des herbiers.

— Nous partageons ici cette impression, fit Mélino ; un patronage plus sérieux entoure et guide nos débutants littéraires. Plusieurs scènes leur sont ouvertes, et, pour suivre votre comparaison, j’ajouterai que nous avons grand soin de ne pas laisser envahir ces terrains consacrés aux jeunes pousses par les pavots du vieux répertoire. Car nous avons aussi le nôtre, mais au lieu de le rabaisser à en faire un remplissage d’affiche, nous avons pour lui