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MADELEINE JÉRÉMIE




I


Dans la partie nord de la Martinique, au pied d’un des plus vastes et des plus riches plateaux de cette belle colonie, se trouve un petit bourg nommé la Basse-Pointe, plus considérable qu’un gros village de France. Ce bourg touche à la mer, toujours violente le long de cette côte, depuis la Table-au-Diable jusqu’à la Pointe-du-Souffleur, où elle jette en toute saison des lames massives qui, en se brisant sur la plage, l’écorchent à de très-grandes profondeurs. L’azur et l’écume mousseuse de ces lames assombries par un sable fin et noir comme du charbon pilé qu’elles enroulent dans leurs larges replis, ajoutent à ce spectacle quelque chose de sinistre.

Cet emportement perpétuel est, si j’osais le dire, le fond naturel du caractère de cette mer ; aussi quand les fureurs de quelque raz-de-marée ou de quelque coup de vent viennent se mêler à cette houle imposante, ce sont des déchaînements effroyables. Le hurlement des lames qui,