Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/188

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’arsenic que le nègre se procure, on ne sait jamais comment, mais toujours en abondance, et qu’il introduit dans les boissons ou dans les mets, des plantes vénéneuses dont il sait le secret mieux que pas un toxicologue, lui servent à appliquer le poison dans les trois conditions que j’ai dites.

Par exemple, s’il s’agit de faire traîner et languir une victime, c’est dans les matelas, c’est dans l’oreiller, dans le traversin que le nègre introduit certaines herbes dont il augmente la dose progressivement. Les émanations de ces herbes produisent ces perturbations dont je parlais ; quand le nègre veut arrêter l’effet du mal, il lui suffit de les enlever.

C’est ce procédé dont Ovide, mandataire de Manette, avait usé contre mademoiselle de Surgy. Quant au bien-être tout à fait inattendu que la jeune fille éprouva aux Pitons, sous la main et à la merci de son bourreau, c’était là une tactique habile que Manette avait employée pour écarter jusqu’à l’ombre du soupçon. Puis elle avait renvoyé à Ovide leur proie commune, plus belle et plus radieuse que jamais.

Manette s’était même montrée si sage, si respectueuse, si dévouée à sa maîtresse pendant le séjour aux Pitons, qu’Églantine, quelque temps après son retour au Fort-Royal, avait obtenu de son père la remise de l’exil de la jeune cabresse.

Les six mois qui avaient été prévus comme terme au mariage des deux jeunes gens étaient écoulés, et M. de Vauclair n’était point encore revenu à la Martinique. Pendant ces six mois, la santé d’Églantine avait éprouvé ces alternatives cruelles d’amélioration et d’ébranlement qui mirent sa vie en danger.

La pauvre enfant reprit encore une fois ses merveilleuses couleurs et ses adorables éclats de beauté. Toute