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— Oui, dit-elle, j’ai empoisonné Madame, parce qu’elle était trop bonne pour rester sur cette terre où elle était si malheureuse, où elle avait tant souffert de tant de façons différentes, la pauvre femme ! Ce n’est pas que mon dévouement pour elle se fût jamais lassé ; j’aurais plutôt succombé à la peine que de renoncer à travailler ; mais deux fois madame Mongenis fut très-malade, sans que la mort ait voulu la prendre, bien qu’elle la désirât. Un jour, je l’ai entendue pleurer si fort, en priant Dieu de la rappeler à lui pour la réunir à son fils qui est là-haut, que j’ai cru devoir faire pour elle ce que la mort lui refusait. Aujourd’hui, ma bonne maîtresse est au ciel, où elle est heureuse enfin ! Je suis donc contente de mon action.

Cora parla ainsi sans forfanterie, sans cynisme, mais non pas sans cette exaltation qui est le caractère des nègres dans toutes les occasions solennelles. En s’entendant condamner aux travaux forcés, Cora ne dit que ces mots :

— Bienheureuse maîtresse, priez pour moi !…