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cruellement en flétrissant sa famille, en y faisant passer, par la violence, un peu de ce sang mêlé, objet de leur dédain…

— Misérable ! s’écria Firmin en levant ses deux poings sur la tête de Jérémie.

— Misérable en effet, répondit le mulâtre, en se résignant à subir cette explosion de colère de la part du jeune créole. Allez, monsieur Firmin, reprit-il, tout crime est puni tôt ou tard, j’expie le mien en ce moment. À cette époque, continua le mulâtre, M. de Nozières faisait la cour à mademoiselle de Jansseigne, ce fut à lui que la jeune fille imputa ma lâche action. Il fut tué, vous savez, dans un combat sur mer, en sorte que la vérité resta un secret entre ma victime et moi. Plus créole que chrétienne, même à son lit de mort, elle ne se désavoua point.

Après cette confidence, qu’il avait écoutée la pâleur au front, Firmin laissa partir Jérémie, et demeura plongé dans ses rêves, assailli par les nouveaux combats que se livraient sa conscience et son cœur.


XXVII


Au moment où le mulâtre rentra dans sa casse, Madeleine vint au-devant de lui en se jetant à son cou :

— Mon père, dit-elle, que s’est-il donc passé entre vous et M. de Lansac ?

— Pauvre enfant ! murmura Jérémie en pressant la jeune fille contre son cœur, dis adieu à tes illusions et à ton bonheur… Tu ne seras pas, tu ne peux jamais être la femme de M. de Lansac !…