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EDWARD BLAKE



Très étrange l’agitation politique qui se produisit à Toronto, vers la fin de l’année 1871.

Chaque soir, durant les dix jours qui suivirent le 8 décembre, la vieille et disgracieuse salle d’assemblée du palais législatif semblait toute métamorphosée par la foule des curieux qui affluaient, à rangs pressés, dans ses galeries étroites et incommodes. Chaque soir, on s’écrasait aux abords de l’enceinte parlementaire, sur les murs de laquelle on aurait pu, avec à propos, placarder les mots « Salle d’attente, » tant était anxieuse l’expression de toutes les figures. C’était une faveur insigne que d’obtenir des billets d’entrée. Des femmes, élégamment mises, piétinaient d’impatience dans les couloirs, en attendant leur tour d’admission. Des personnes de marque, qui n’avaient pu réussir à obtenir ce privilège, cherchaient le moyen de se glisser sur le parquet de la chambre ; et l’orateur avait dû tellement céder aux obsessions que, derrière le trône, une foule se coudoyait dans l’espace réservé aux représentants du peuple. C’était une licence que, seule, pouvait excuser une occasion extraordinaire.

L’instinct guerrier, l’amour de la lutte sont très marqués chez les gens d’origine britannique. Nous disons « britannique, » car ce caractère est encore plus frappant chez les Celtes que chez les Anglo-Saxons à qui ce mot « British » est le plus souvent appliqué. Chaque fois qu’il s’engage, dans quelque coin de l’Empire, une campagne pour une cause ou pour une autre, on y est porté à choisir un homme qui représente l’idée de tous ; et, dès lors, l’intérêt se fixe sur lui plus que sur le principe dont il a assumé la défense. Il en était ainsi aux jours de décembre 1871, et l’opinion était plus intéressée dans le duel qui allait se livrer entre Sanfield Macdonald et Edward Blake, que dans le succès de la cause que chacun