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force à son argumentation. Quand il reprit son siège, on sentit des deux côtés que le gouvernement était condamné et ce fut sans surprise que l’on apprit bientôt après que l’administration abandonnait le pouvoir.

Il n’entre pas dans le cadre d’une courte esquisse biographique comme celle-ci, de suivre en détail les incidents bien connus d’une carrière dont nous avons mis en lumière deux heures triomphales. Depuis lors, M. Blake a subi bien des revers politiques : il a sans doute été bien souvent écœuré de la petitesse, de la mesquinerie et de la fausseté de la vie publique, ainsi que de la bassesse de plus d’un de ses partisans ; sa santé s’est même ébranlée sous la tâche de Titan qu’il s’était imposée. À l’heure présente, nous ne dirons pas qu’il boude sous sa tente comme Achille ; mais il se tient à l’écart et il laisse les autres s’escrimer contre l’ennemi.

Il est un fait sur lequel nous devons nous arrêter. On trouverait difficilement, non seulement dans notre histoire, mais dans celle des autres peuples, un homme public éminent qui ait fait plus de sacrifices pour la politique et en ait moins retiré d’avantages matériels. Quand il arriva au pouvoir, dans Ontario, M. Blake se choisit une position sans traitement. Quand son parti se fut emparé de l’administration, à Ottawa, il se contenta encore, dans le cabinet, d’une position à laquelle aucun émolument n’était attaché. Quelque temps avant les élections de 1887, il s’aperçut que sa santé ne lui permettrait pas de mener de front l’exercice de sa profession et l’accomplissement de ses devoirs publics. Nous nous rappelons tous le frisson d’admiration qui secoua le public, admiration que ne purent s’empêcher de partager les journaux de l’opposition, quand on apprit qu’il avait résolu d’abandonner sa profession pour consacrer tout son temps aux affaires publiques. Cela ne signifiait rien moins que le renoncement au revenu le plus considérable qu’un homme de sa profession ait jamais tiré de sa clientèle en ce pays, revenu auquel le traitement bien légitime d’un ministre ne saurait se comparer. On appréciera encore mieux l’importance du sacrifice, quand on se souviendra que cet homme, qui renonçait ainsi à un revenu princier, voguait sur les froides ondes de l’opposition.

Comme orateur et debater, M. Blake brille au premier rang. Dans le premier portrait de cette galerie, M. Waters fait un parallèle