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avec une merveilleuse élasticité, aux cahots les plus brusques, aux soubresauts les plus imprévus. Nous n’avons jamais appris que personne se fût fracassé la tête. Les cochers, n’ayant d’autre siège qu’un des brancards du timon, y conservent un équilibre imperturbable.

Pour nous résumer, tous les systèmes de locomotion usités en Chine sont ou fatigants, ou dangereux, ou ennuyeux. Il arrive même qu’ils réunissent, comme les chariots, les trois inconvénients à la fois. Les jonques mandarines sont ce que nous avons rencontré de mieux et de plus confortable. Depuis que nous étions partis de Nan-tchang-fou pour remonter le fleuve Tchang, les journées s’écoulaient avec une rapidité et un calme indicibles. Nous profitâmes de cette période de paix et de tranquillité pour recueillir nos souvenirs et rassembler les notes qui nous aident aujourd’hui à rédiger cette relation. Ce coup d’œil jeté sur toutes nos anciennes tribulations fut pour nous une source d’émotions pleines de suavité. On ne peut goûter pleinement les douceurs du repos qu’à la suite de longues fatigues. Quand le marin est entré dans le port, il aime souvent à penser aux furieuses tempêtes de l’Océan, et les extases de la félicité sont uniquement réservées par la Providence aux cœurs qui ont été broyés par les souffrances.

Ces journées de douce et paisible navigation nous procurèrent la connaissance de la littérature légère des Chinois. Notre domestique Wei-chan était un grand lecteur ; toutes les fois qu’il descendait à terre, il revenait avec une abondante provision de petites brochures,