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condamnés à boire de l’eau chaude. Cette contrée, comme on voit, n’était pas précisément arrangée de manière à y faire des voyages d’agrément et de fantaisie. Cependant nos deux journées de marche à travers ces terres incultes furent pour nous un véritable délassement et une source de ces jouissances vagues et mélancoliques dont parfois le cœur de l’homme aime tant à se repaître. Il nous semblait errer encore au milieu des sauvages solitudes de la Mongolie. Les mœurs des tribus nomades, leurs tentes, leurs troupeaux, les longues caravanes de chameaux, les grandes herbes du désert, les sarligues et les brebis jaunes, les monastères bouddhiques avec leurs nombreux lamas : tous ces souvenirs se réunissaient peu à peu, et fournissaient à notre imagination des tableaux pleins de charme et de variété. Il y avait si longtemps, d’ailleurs, que nous étions tourbillonnant au milieu de cette immense cohue de la civilisation chinoise, que notre esprit avait besoin d’un peu de calme et de repos. Le tumulte et l’agitation de tant de grandes villes avaient fini par nous donner comme une fièvre perpétuelle ; il nous fallait, pour quelques jours, la paix silencieuse du désert.

Avant d’arriver à Nan-tchang-fou, nous nous arrêtâmes dans une sorte de corps de garde, afin de laisser passer les heures les plus chaudes de la journée. Nous fûmes très-gracieusement accueillis par un mandarin à globule blanc, qui avait là sous ses ordres une quinzaine de soldats. Les rafraîchissements qu’il nous offrit étaient peu séduisants. Du thé, du vin de riz, des pistaches grillées, des confitures de gingembre et des ciboulettes macérées dans de la saumure, tout cela n’était guère de