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La route que nous suivions était assez large ; probablement elle avait été belle autrefois, sous les dynasties antérieures, mais, pour le moment, elle était détestable, défoncée à peu près partout, pleine de creux, de monticules, de bourbiers et d’effroyables ornières, que les chariots et les brouettes suivaient avec la plus scrupuleuse assiduité. Il était facile de voir que le temps était le seul fonctionnaire chargé de l’entretien de la route. Les Chinois prétendent que l’incurie du gouvernement, au sujet des voies de communication, ne date que de l’avènement de la dynastie tartare-mantchoue. L’administration, en effet, ne s’occupe nullement des chemins, excepté de ceux où doit passer l’empereur, quand il se donne la peine de voyager. Quant au peuple, il est obligé de s’en tirer comme il peut ; aussi, dans les provinces du Nord, où les rivières navigables sont moins nombreuses, il arrive de fréquents accidents ; des voitures renversées et des voyageurs écrasés ne sont pour personne un sujet d’étonnement ; on passe à côté sans s’en émouvoir. Il existe plusieurs localités où la sollicitude publique cherche à suppléer à cette déplorable insouciance de l’administration. Il est d’usage, dans les procès, les contestations et les querelles, de n’avoir recours aux tribunaux qu’à la dernière extrémité ; on aime mieux choisir, pour juges et arbitres, des vieillards recommandables par leur probité et leur expérience, et dont on respecte les décisions. Dans ce cas on a l’habitude de condamner les coupables à réparer, à leurs frais, une certaine longueur de chemin assignée par les arbitres. Dans ces contrées, la bonne tenue des routes est toujours en raison directe de l’esprit querelleur et litigieux des habitants.