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nous suivions, sur un chariot de louage, la route impériale bordée de grands arbres. Pendant que le voiturier, assis sur un des brancards du véhicule, était occupé à fumer sa pipe et à fouetter ses maigres mulets, nos yeux erraient vaguement sur une plaine triste et monotone, qui s’étendait devant nous à perte de vue. Le phaéton chinois, après avoir secoué les dernières cendres de sa pipe, sauta à terre et courut un peu en avant, la tête en l’air, et regardant à droite et à gauche comme un homme qui va à la découverte. Il revint en courant et nous dit : Regardez en haut des arbres qui bordent la route. — Nous levâmes les yeux vers la direction qu’il nous indiquait avec le manche de son fouet, et nous aperçûmes comme de nombreuses petites cages suspendues aux branches des arbres ; on eût dit des appareils pour prendre des oiseaux. — Qu’est-ce donc que cela ? Demandâmes-nous au voiturier. — Regardez attentivement, vous le saurez bientôt. — Le chariot avança, et nous vîmes, en frissonnant d’horreur, une cinquantaine de cages, grossièrement fabriquées avec des barreaux de bambou et renfermant des têtes humaines. Presque toutes étaient en putréfaction et faisaient des grimaces affreuses. Plusieurs cages s’étant disloquées et disjointes, quelques têtes pendaient accrochées aux barreaux par la barbe ou les cheveux, d’autres étaient tombées à terre, et on les voyait encore au pied des arbres. Nos yeux ne purent soutenir longtemps ce hideux et dégoûtant spectacle.

Le voiturier nous raconta que le district était infesté de bandes de voleurs qui désolaient la contrée, et dont les mandarins n’avaient jamais pu s’emparer. Au commencement