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la vaisselle et jonchait le plancher de débris de porcelaine. En voyant l’homme accourir armé d’un pavé, tout le monde s’empressa d’aller s’opposer à un malheur imminent ; mais il n’était plus temps… ; ce furieux avait lancé son pavé contre la grande marmite en fonte de fer et l’avait défoncée du coup. La femme ne pouvant pas enchérir sur cette extravagance, la querelle cessa. Un mauvais plaisant, qui se trouvait là, dit au mari en riant : — Tu es un imbécile, mon frère aîné ; plutôt que de crever la marmite avec ton pavé, que ne cassais-tu la tète à ta femme ? De cette manière, tu serais sûr d’avoir la paix dans le ménage. — J’y ai bien pensé, répondit froidement ce gracieux mari ; mais c’eût été une sottise. Avec deux cents sapèques je ferai raccommoder ma marmite, au lieu que, pour acheter une femme quelconque, il faut toujours une somme un peu forte… Une pareille réponse n’a rien de surprenant pour ceux qui connaissent les Chinois.

Les femmes du Céleste Empire sont si malheureuses, que, dans plusieurs endroits, la vue des maux qu’elles ont à souffrir en cette vie a contribué à leur faire concevoir des espérances pour une vie future. On a le cœur navré en voyant ces pauvres victimes d’une civilisation sceptique et corrompue s’agiter au milieu de leurs souffrances, chercher partout vainement quelques consolations, et, faute de connaître la religion chrétienne, se jeter avec ardeur dans les extravagances de la métempsycose, Il s’est formé une secte, dite des abstinentes, qui prend un grand accroissement, surtout dans les provinces méridionales. Les femmes qui s’enrôlent dans cette confrérie font vœu de ne jamais manger ni viande ni