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l’attente d’un affreux malheur et en proie aux plus cruelles angoisses. La voix de ces petits enfants et de ce vieillard, appelant à grands cris l’âme d’un père et d’un fils, avait quelque chose de navrant.

Le lendemain matin, comme nous nous rendions auprès de cette famille éplorée dans le but de lui apporter, s’il était possible, quelques paroles de consolation, un des domestiques de la maison nous arrêta, en nous disant que le malade venait de mourir. Les Chinois ont une foule de tournures pour exprimer que quelqu’un est trépassé. Il n’existe plus, il est mort, il a salué le siècle, il est parti, il est monté au ciel, sont autant d’expressions plus ou moins élégantes qu’on doit employer suivant la qualité des personnes dont on parle. Quand il est question de l’empereur, on dit qu’il s’est écroulé. La mort du chef de l’empire est considérée comme une immense catastrophe dont le retentissement n’est comparable qu’au fracas produit par l’écroulement d’une montagne. Nous ne tardâmes pas à voir les personnes qui allaient et venaient dans la maison du mort, revêtues des babils de deuil, c’est-à-dire d’un bonnet et d’une ceinture en toile blanche. Le deuil complet et de parade exige que tous les habits soient blancs ; on n’en excepte pas même les souliers, ni le petit cordon de soie avec lequel on tresse et noue les cheveux en forme de queue. Les usages chinois étant presque toujours en opposition avec ceux de l’Europe, il fallait bien s’attendre à ce que le blanc fût parmi eux la couleur du deuil.

Les Chinois ont l’habitude de garder les morts chez eux pendant fort longtemps ; on ne les enterre souvent que le jour anniversaire de leur décès ; en attendant, le