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caractères… En prononçant ces paroles, il nous montrait une petite barque renfermant une cargaison de chiffons de papier. — Le respect pour les caractères, ajouta-t-il, a été recommandé par les saints de l’antiquité. Après ce petit incident, la flottille de bonzes continua sa route.

Nous étions en droit de penser que cette compagnie de quêteurs avait fait une assez bonne collecte ; sans cela, le vieux bonze n’eût pas donné de coup de poing au jeune novice. Quand les Chinois ont de l’argent, ils ne le disent pas, et, lorsqu’ils se vantent d’en avoir, on peut être presque toujours assuré que leur bourse est vide. Cette manie n’est pas tellement propre au caractère chinois, qu’on ne puisse aussi quelquefois la retrouver ailleurs.

En nous montrant une barque remplie de chiffons de papier, le vieux bonze quêteur nous avait dit que le respect pour les caractères avait été recommandé par les saints de l’antiquité. Nous avons en effet remarqué, durant notre long séjour dans le Céleste Empire, que, généralement, tous les Chinois professent une profonde vénération pour la parole écrite. Ils ont grand soin de ne pas employer à des usages profanes le papier qui contient des caractères imprimés ou tracés au pinceau. Ils fabriquent du papier grossier et à bas prix, destiné aux enveloppes, aux emballages et à une foule d’autres usages. On conserve avec respect celui qui est écrit, on évite de le fouler aux pieds et de lui laisser contracter des souillures. Les enfants mêmes ont cette habitude. Nous ne pensons pas que les Chinois attachent à cette pratique aucune idée superstitieuse. Il nous a semblé qu’ils entendaient simplement honorer de cette manière