Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée

pays, que, la plupart du temps, les mandarins se dispensent de rendre eux-mêmes la justice, soit par paresse, soit pour ne pas étaler aux yeux du peuple leur incapacité. Ils se tiennent dans un cabinet privé, ordinairement séparé du tribunal par une simple cloison. Les parties discutent leur affaire en présence des scribes et des fonctionnaires ; ceux-ci vont de temps en temps exposer, selon leur fantaisie, l’état de la question à ces juges indignes qui, mollement couchés sur un divan, sont beaucoup plus préoccupés de leur pipe et de leur tasse de thé que de la vie ou de la fortune de leurs administrés. Ils ne sont pas même distraits par la sentence qu’ils auront à prononcer. On la leur apporte toute rédigée, et ils n’ont qu’à y apposer leur sceau. Cette manière de juger est tellement devenue à la mode, qu’un magistrat qui veut bien se donner la peine d’assister aux procès et d’interroger lui-même les parties est regardé comme un personnage extraordinaire et digne de l’admiration publique.

Nous fûmes forcés de nous arrêter à Han-tchouan deux jours entiers, durant lesquels le vent ne cessa de souffler avec une extrême violence. Personne n’était d’avis de s’embarquer sur le fleuve Bleu ; nous n’avions pas encore oublié le triste naufrage du secrétaire de Song-tche-hien et notre triple échouement sur le rivage. Les mandarins de Han-tchouan, très-peu désireux de garder chez eux nos illustres et précieuses personnes, aimaient encore mieux subir cet embarras qu’assumer la responsabilité d’un naufrage ; cependant, comme il nous en coûtait de ne pas profiter de cette petite tempête qui rafraîchissait singulièrement l’atmosphère, nous proposâmes