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nouvelle de sa nomination excita donc une réprobation générale, qui se manifesta d’abord, selon l’usage, par les placards les plus satiriques et les plus violents. Une députation des plus notables bourgeois de la ville partit pour la capitale de la province, afin de présenter au vice-roi une requête dans laquelle on le suppliait très humblement d’avoir pitié du pauvre peuple et de ne pas lui envoyer, au lieu d’un Père et Mère, un tigre pour le dévorer. La requête n’eut pas de succès, et il fut décidé que le mandarin irait prendre possession de son poste au jour déterminé.

Les députés s’en retournèrent reporter cette malheureuse nouvelle à leurs concitoyens. Aussitôt la ville fut plongée dans la consternation ; mais on ne se borna pas à se désoler en secret. Les chefs de quartiers se réunirent et tinrent un grand conseil où furent appelés les personnages les plus influents. Il fut décidé qu’on ne permettrait pas au nouveau préfet de s’installer, et qu’on le chasserait poliment de la ville.

Cependant celui-ci se mit en route à l’époque fixée, et arriva à son poste, accompagné d’une suite nombreuse. Il n’y eut pas d’émeute sur son passage, pas même le plus petit signe d’opposition. Tout le monde, au contraire, s’était prosterné à son approche, pour rendre hommage à sa dignité. Il demeura donc convaincu que tout allait bien, et que ses craintes d’une mauvaise réception étaient chimériques et sans fondement. À peine fut-il entré dans son tribunal, avant même d’avoir eu le temps de prendre une tasse de thé, on lui annonça que les notables de la ville demandaient audience. Il les fit entrer avec empressement, bien persuadé qu’on venait le