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tente, en la compagnie des deux aimables compagnons qu’on nous avait donnés chez le juge de paix. De là, nous pouvions nous amuser à contempler le mouvement et l’agitation qui régnaient dans le tribunal. Les mandarins qui devaient prendre part à la cérémonie arrivaient successivement en grand costume et suivis de leur état-major, qui avait toutes les allures d’une bande d’assassins et de voleurs. On voyait courir de côté et d’autre les satellites, affublés de longues robes rouges et coiffés de hideux chapeaux pointus, en feutre noir ou en fil de fer, et surmontés de longues plumes de faisan. Ils étaient armés de vieux sabres ébréchés, de chaînes, de tenailles, de crampons et de divers instruments de supplice, dont il nous serait impossible de préciser les formes bizarres et affreuses. Les mandarins se réunissaient par petits groupes et causaient entre eux avec de grands éclats de rire ; les officiers subalternes, les scribes, les satellites, les bourreaux, allaient et venaient en courant pour se donner de l’importance ; tout le monde avait l’air de se promettre une séance très-curieuse et assaisonnée d’émotions inusitées.

Toute cette agitation, tous ces préparatifs interminables avaient quelque chose d’outré et d’extravagant. Évidemment on cherchait à nous faire peur. Enfin, tout le monde disparut, et un grand silence succéda à ce long tumulte. Un instant après, un cri affreux, poussé par un grand nombre de voix, se fit entendre dans la salle d’audience ; il se renouvela trois fois, et nos compagnons nous dirent que les juges faisaient leur entrée solennelle et s’installaient sur leurs sièges. Deux officiers décorés du globule de cristal se présentèrent dans