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nos rapports à la fois pénibles et consolants avec l’ambassadeur chinois et le régent du Thibet, enfin notre expulsion de Lha-ssa et ces trois mois affreux pendant lesquels nous fûmes tous les jours condamnés à escalader des montagnes parmi la neige, les glaces et les précipices…… : tous ces événements, tous ces souvenirs, encombraient notre tête et s’y entassaient pêle-mêle. Il y avait de quoi en devenir fou ! Et cependant tout n’était pas encore fini : actuellement nous étions entre les mains des Chinois, seuls, sans amis, sans protection, sans secours. Nous nous trompons ; nous avions Dieu pour ami et pour protecteur. Il est des positions dans la vie où, lorsque la confiance en Dieu s’en va du cœur de l’homme, il ne peut plus y avoir de place que pour le désespoir ; mais, lorsqu’on prend le Seigneur pour appui, on se trouve doué d’un courage incomparable. Dieu, nous disions-nous, a évidemment fait des miracles pour nous sauver la vie dans la Tartarie et le Thibet ; il est bien probable que ce n’est pas pour qu’un Chinois quelconque puisse en disposer à sa fantaisie…… Et là-dessus nous conclûmes qu’il y avait lieu à nous tenir parfaitement tranquilles et à laisser aller nos petites affaires suivant le bon plaisir de la Providence. La nuit était très-avancée ; nous fîmes notre prière, qui, à la rigueur, pouvait être celle du matin, et nous nous couchâmes en paix.

Le lendemain, on nous remit, de la part du préfet du Jardin de fleurs, une longue et large feuille de papier rouge ; c’était une invitation à dîner pour le jour même. Quand l’heure fut venue, nous montâmes en palanquin et nous partîmes. Les tribunaux des manda-