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mais qui nous faisaient assez comprendre qu’ils désiraient se mettre en rapport avec nous. Enfin, l’un d’eux, après avoir bien regardé de tous côtés pour voir s’il n’était pas aperçu, entra dans notre chambre, ferma la porte sur lui, puis fit le signe de la croix et se mit à genoux en nous demandant notre bénédiction… C’était un chrétien ! Il en arriva bientôt un second, puis un troisième ; toute la famille enfin, préposée à la garde du koung-kouan, se réunit autour de nous. Cette famille tout entière était chrétienne ; pendant la journée, elle n’avait osé nous faire aucune manifestation en présence des mandarins, de peur de compromettre sa position… Il est impossible qu’on se fasse une idée des émotions que cette rencontre nous fit éprouver ; elles furent si vives et si profondes que celui qui écrit ceci ne peut encore, six ans après, en rappeler le souvenir sans sentir battre son cœur et ses yeux se mouiller de larmes. Ces hommes qui nous entouraient nous étaient inconnus, et cependant nous étions les uns pour les autres des frères et des amis. Leurs sentiments et leurs pensées sympathisaient avec nos pensées et nos sentiments. Nous pouvions nous parler à cœur ouvert, car nous étions étroitement unis par les liens de la foi, de l’espérance et de la charité. Ce bonheur ineffable d’avoir partout des frères n’est que pour les catholiques. Eux seuls peuvent parcourir la terre du nord au sud et du couchant à l’aurore avec l’assurance de rencontrer partout quelque membre de la grande famille. On parle beaucoup de fraternité universelle ; mais, si on l’aime du fond du cœur et non pas seulement du bout des lèvres, qu’on s’intéresse donc efficacement à la belle œuvre de la propagation de la foi,