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d’un jour partout où nous devions nous arrêter, et fit déclarer à tous les mandarins des villes par où nous passions qu’absolument nous ne voulions pas aller loger dans les koung-kouan, que cette bizarrerie tenait au caractère des gens de notre nation, et qu’il était impossible de nous plier en cela aux usages de l’empire du Milieu. On n’avait donc qu’à lui remettre les allocations fixées pour notre réception au koung-kouan, et il se chargerait lui-même de nous entretenir d’une manière conforme à nos goûts et à nos désirs. Les mandarins et les gardiens des palais communaux adoptaient, de leur côté, avec empressement une mesure qui les mettait à l’abri de tout souci et de tout embarras ; or, il paraît que nos goûts et nos désirs n’aspiraient qu’à aller nous caser dans une pauvre hôtellerie pour y vivre d’un peu de riz cuit à l’eau avec accompagnement d’herbes salées et de quelques tranches de lard ; de plus, comme nous entrions dans les pays chauds, le vin eût été trop échauffant et nuisible à des estomacs venus des mers occidentales ; du thé bien clair et bien léger était ce qui nous convenait le mieux. De cette façon, notre rusé musulman trouva moyen de dépenser tout au plus un dixième de la somme qu’il recevait, et de faire rentrer le restant dans son escarcelle. Cette découverte fut pour nous de la plus haute importance, car elle nous fit connaître l’étendue de nos droits et la valeur de l’individu à qui nous étions confiés.

Au moment où nous allâmes nous coucher, nous remarquâmes que les gardiens du koung-kouan rôdaient autour de nous d’une façon toute mystérieuse. Ils nous adressaient furtivement quelques paroles insignifiantes,