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quantité prodigieuse qui s’en expédie annuellement des provinces du Kan-sou et du Sse-tchouen. Ces articles, qu’on ne peut, en aucune manière, considérer comme des objets de première nécessité, sont toutefois tellement entrés dans les habitudes et les besoins des Thibétains qu’ils ne sauraient maintenant s’en passer. Ainsi ils se sont rendus volontairement les tributaires de cet empire chinois qui pèse lourdement sur eux, et dont ils auraient si grand intérêt à secouer le joug. Il leur serait donné peut-être de vivre libres et indépendants au milieu de leurs montagnes, s’ils savaient se passer des Chinois en bannissant de chez eux le thé et les écharpes de félicité… C’est, sans doute, ce qu’ils ne feront pas, car les besoins les plus factices sont souvent ceux dont on a le plus de peine à se défaire.

Après avoir franchi le fameux Fey-yué-ling, qui se dresse, sur les frontières de l’empire du Milieu, comme une sentinelle avancée des montagnes du Thibet, nous retrouvâmes la Chine avec ses belles campagnes, ses villes et ses villages, et sa nombreuse population. La température s’éleva rapidement, et bientôt les chevaux thibétains que conduisaient les soldats chinois de la garnison de Lha-ssa, se trouvèrent tellement accablés de chaleur qu’on les voyait s’en aller tristement le cou tendu, les oreilles baissées et la bouche entr’ouverte et haletante. Plusieurs ne résistèrent pas à cette brusque transition et moururent en route. Les soldats chinois, qui avaient compté les vendre très-cher dans leur pays, étaient furieux et maudissaient dans leur colère le Thibet tout entier.

Un peu avant d’arriver à Tsing-khi-hien, ville de