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augmenta de violence, et quelques jonques doublèrent la pointe et disparurent derrière les terres. Les deux barques de transport qui nous avaient précédés réussirent de la même manière ; nous pensions que notre tour arriverait bientôt aussi. Nous allions et revenions toujours inutilement dans le même sillage ; enfin une forte rafale nous prit, et nous jeta, non pas en dehors de la pointe, mais sur le côté opposé ; heureusement, la plage était saine, il n’y avait que du sable et de la vase, sans quoi la jonque était fracassée. Après que l’équipage eut longtemps vociféré, on essaya de se remettre à flot ; tout le monde s’y employa, matelots, mandarins et missionnaires ; à force de peines et de sueurs nous parvînmes à nous désensabler, et nous reprîmes notre manœuvre. Cette fois nous ne pûmes atteindre à la hauteur de la pointe ; au retour une seconde rafale nous prit et nous précipita de nouveau sur la plage que nous venions de quitter.

La prudence exigeait que, avec un temps pareil, nous ne fissions pas de nouvelles tentatives. Nous essayâmes de démontrer au patron qu’il courait risque de briser sa jonque et de nous noyer, ce qui, pour lui d’abord et pour nous ensuite, serait fort désagréable. En supposant même que nous parviendrions à entrer dans la passe, en serions-nous bien avancés, avec l’affreux vent debout que nous trouverions de l’autre côté et qui nous empêcherait de faire route ? Nous fûmes donc d’avis de rester où nous étions et d’y attendre en paix un moment plus favorable.

Cette détermination était assurément pleine de sagesse et de prudence ; mais l’amour-propre l’emporta. Le pa-