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Il était minuit passé quand nous arrivâmes au port de Kien-tcheou, ville de troisième ordre. La nuit était d’une obscurité profonde, et la pluie continuait toujours. Nous allâmes jeter l’ancre le plus près possible du rivage, où nous remarquâmes un grand mouvement de lanternes qui se croisaient dans tous les sens : c’étaient les employés des tribunaux de la ville et le scribe de maître Ting qui nous attendaient. Le débarquement se fit avec d’effroyables vociférations et au milieu d’une confusion inénarrable. Aussitôt que nos palanquins furent passés de la cale sur le rivage, nous entrâmes dedans, et nos porteurs, qui, ayant été au repos pendant plus de trente heures, éprouvaient, sans doute, le besoin de se dégourdir les membres, nous emportèrent brusquement et au pas de course. Au moment où ils partaient, maître Ting leur cria, à gorge déployée, de nous conduire à l’hôtel des Désirs accomplis.

A un détour de rue nous fîmes arrêter les porteurs et nous leur ordonnâmes de se diriger vers le palais communal ; car c’était là seulement que nous devions loger et non dans les auberges. Ils en prirent aussitôt la route, pendant que l’escorte se dirigeait probablement vers l’hôtel des Désirs accomplis. Nous fûmes bientôt arrivés ; mais rien ne faisait soupçonner que nous fussions attendus. Toutes les portes du palais étaient fermées. Nous dîmes à nos porteurs de heurter, et il faut proclamer à leur louange qu’ils s’en acquittèrent avec une énergie dont nous fûmes stupéfaits. Un tas de grosses pierres était là tout près ; elles volèrent aussitôt, les unes après les autres, contre la porte qui fut bientôt enfoncée. Un vieux gardien parut, en costume très-incomplet, tout hors de lui et ne com-