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paille à larges bords se décoiffent ; tout le monde doit garder le silence et prendre une attitude respectueuse et filiale, en présence de celui qu’ils nomment leur Père et Mère, et qui passe fièrement devant eux, en leur jetant à travers les portières de son palanquin un regard oblique et dédaigneux. Ceux qui, par oubli ou négligence, manquent de se conformer aux exigences du cérémonial, sont immédiatement et brutalement rappelés à leur devoir par des satellites de mauvaise mine, mal peignés, à la figure blême et aux yeux courroucés, qui leur appliquent sans pitié des coups de fouet et de rotin, afin de leur inspirer les sentiments de la piété filiale.En général, le peuple se soumet de bonne grâce à toutes ces exigences, auxquelles il se trouve plié et façonné par une longue habitude, et dont il ne conteste nullement la légitimité et les avantages. Cependant il se rencontre de temps en temps des Chinois qui, se croyant injustement maltraités, se révoltent contre les satellites. Alors surgissent des querelles et des batailles auxquelles tout le monde veut prendre part ; on s’ameute, on vocifère, les curieux et les désintéressés prennent toujours parti en faveur du citoyen contre les agents de l’autorité. Les satellites deviennent bientôt humbles et tremblants : on les pousse, on les harcelle, on les insulte, on les tire par la queue, et le mandarin doit enfin sortir de son palanquin et essayer d’apaiser cette petite sédition de hasard. S’il est aimé et estimé du peuple, la chose est facile ; on écoute ses exhortations et tout rentre dans l’ordre. Si, au contraire, on a des griefs contre lui, on profite instinctivement de cette heureuse circonstance pour lui donner une leçon. Le sarcasme et les injures se croisent sur sa