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fruits secs ou des fragments de canne à sucre, on sommeillait sur le bout d’un divan, on se donnait de l’air avec de larges feuilles de palmier plissées en éventail, on jouait une partie aux cartes et aux échecs, puis, de temps en temps, arrivaient quelques mandarins désœuvrés, et alors on se lamentait avec eux sur les embarras et les incommodités des fonctions publiques. Telle était la vie que menait le juge de paix. Nous ne l’avons pas surpris une seule fois le pinceau à la main ou lisant dans un livre.

Il est à croire que tous les fonctionnaires chinois ne ressemblent pas à Pao-ngan, nous en avons connu plusieurs qui étaient, au contraire, studieux, pleins d’activité et doués d’une grande intelligence. Le désir et l’espoir de l’avancement dans leur carrière les tenaient toujours en haleine.

Durant notre séjour à la justice de paix, lorsque nous sentions la fatigue et l’ennui nous gagner au milieu de notre entourage habituel, nous allions nous réfugier auprès d’un personnage qui passait la majeure partie du jour chez Pao-ngan. C’était un vénérable gradué ès lettres, instituteur des enfants du Trésor caché. Nous lui parlions de l’Europe, et, en retour, il nous racontait des chinoiseries qu’il savait merveilleusement assaisonner d’une foule de sentences tirées des auteurs classiques. Le vieux lettré chinois ressemble beaucoup à nos érudits d’autrefois, dont la conversation était toujours hérissée de citations grecques et latines. En France, ils ont presque entièrement disparu, et on n’en trouve plus aujourd’hui que très-difficilement. Ce type est au contraire, en Chine, dans toute sa splendeur. Le savant