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sacs de farine de maïs et d’autres céréales. Sur le faîte de ce tas on asseyait la cage à volaille, souvent, le pourceau, le chien et le chat, tous ensemble attachés.

On voyait quelque soldat se précipiter vers une baba :

— Que veux-tu faire encore de ce métier tout pourri ? Jette-le au diable !

— Laisse-le moi ! Je l’ai depuis cinquante ans ! c’est mon pauvre mari qui me l’a fait de ses mains !

— Et ces poutres, ces planches vermoulues ?

— On ne sait pas à quoi ça peut encore servir : on en aura peut-être besoin pour nos huttes. Laisse-les là !

— Et ce tas de ferraille ?

— On le vendra au Juif qui achète du vieux fer au kilo.

C’est ainsi qu’à l’arrivée du déluge, bien des radeaux ne flottaient plus ou se renversaient.

Parfois, des sous-officiers passaient en inspection. Remarquant la tenue peu réglementaire des soldats, ils criaient :

— Comment ? en caleçon ?

— Que vous viviez, monsieur le sergent ! C’est la canicule !

— Vite, le pantalon ! Ne vois-tu pas les jeunes filles qui te regardent ?

— Si ça leur fait plaisir, monsieur le sergent !

Chassés par le père Alexe, dès leur arrivée à la maison, — (« Allez-vous-en, voyous ! c’est la prison qui vous attend tous deux ! »), — Minnka et Minnkou se jetèrent frénétiquement au secours de tous ceux qui voulaient de leurs bras. De bouche en bouche, les enfants remplirent le village du cri :

— Tsatsa-Minnka est ici ! et Nénika Minnkou est avec elle !

On les appelait dans dix ménages à la fois. Partout