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nent par les passions. Car la passion est en Orient une étincelle qui brille dans le ventre de tout humain vermisseau et peut, d’un jour à l’autre, devenir un volcan.

La passion de Sima fut la belle « tsatsa Minnka », ainsi que l’appellera, imitant le petit Zamfir, la gaillarde clientèle masculine de sa fameuse taverne.

Sima Caramfil, conformément à la loi orientale de l’héroïque moyen de parvenir avait, après dix-huit années de servitude sournoise, épousé la fille unique de son patron ; autrement dit, il n’avait fait, jusqu’à ses vingt-huit ans, que guetter une femme laide et sa belle dot. Il les eut, toutes deux, apprécia la dernière et faillit mourir d’ennui à cause de l’autre. Mais le dieu de tous les Sima veillait : au bout de trois années d’affreux ménage, l’inutile épouse mourut d’une mort aussi naturelle que sa laideur. C’est alors que Sima se mit en tête d’aimer : « Je chercherai une femme qui n’ait que sa chemise, mais qui soit la plus belle du département. »

Il la découvrit dans le voisinage immédiat de Braïla ; et tout de suite, se rendant compte de ce qu’il valait à côté d’une belle jeune fille comme Minnka, il décréta que le bonheur ce n’était pas l’amour, mais le bien-être.

Père Alexe le crut sur parole et lui donna sa fille.

La noce eut lieu dans le village. Fastueuse. Il y eut à manger et à boire pour deux cents personnes. Six musiciens tsiganes, d’un choix royal, avaient délecté les convives. Mais la délectation la plus appréciée, la plus attendue, par les commères du village, — la constatation publique de l’innocence de la mariée, le lendemain de la noce, — Sima la refusa nettement. À