trahissait une grande lassitude et pas la moindre envie d’entamer un brin de conversation.
Cela se passait vers la fin du mois d’août. Malgré la nuit qui commençait à tomber, la fosse où gît Athènes restait étouffante comme une étuve. Le voisin de table d’Adrien demanda « de la bière fraîche et des cigarettes ». Le garçon répondit que « des cigarettes, il n’y en avait pas ».
— Vous pouvez prendre les miennes, fit Adrien, qui s’empressa d’offrir sa boîte à l’inconnu.
Celui-ci, gauche, un peu confus, accepta l’offre, remercia et dut, bon gré mal gré, prendre langue avec Adrien, tant il est vrai qu’il n’y a rien à faire quand un homme bienveillant vous accable.
Dès les premiers mots échangés, l’un et l’autre comprirent que le grec qu’ils parlaient était loin d’être du pur athénien :
— Il me semble que vous êtes roumain, dit Adrien avec l’audace de l’Oriental.
Son interlocuteur sourit, ce qui modifia complètement les traits de son visage, lui donnant un air beaucoup plus amical :
— Oui, je suis roumain…
— D’où ?
— De Sulina, mais j’ai vécu longtemps à Bucarest.
C’est à ce bref dialogue que se borne, généralement, toute la curiosité des voyageurs prudents, dans ce vaste monde. Beaucoup n’ont même pas cette curiosité, si boiteuse, si pauvre de chaleur soit-elle. D’autres, guère nombreux, la poussent un peu plus loin. Ils ajoutent :
— Et qu’êtes-vous venu faire ici ?