— Il me faut peut-être une femme comme toi, qui possède une petite rente ! Justement, je n’aime pas le travail, je suis un paresseux. Me veux-tu, tel que ?
— Oui.
Adrien la considéra longuement :
— Tu es folle, Loutchia !
Une voix tremblante se fit entendre derrière la porte :
— Madame est servie.
— Voilà ! fit Adrien, pouffant de rire. « Madame est servie ! » C’est toi qui lui as appris cette bêtise des grandes dames ? Pauvre Loutchia ! Je te plains… Mais laissons là toutes ces questions et allons manger. Je sens une bonne odeur de piments farcis.
Loutchia lui sauta au cou et l’étouffa de baisers :
— Oui, oui, oui ! Tu seras mon compagnon, mon mari, mon amour et même le vrai père de Titi, car tu es honnête, voilà, honnête !
Il n’eut pas la force de s’opposer à son étreinte. Le sang lui affluait au visage. Sa tête tourna, comme au-dessus du vide. Ses tempes battaient au point de lui faire mal. Elle le sentit et, encouragée, y alla de son mieux, le brûlant de son corps enflammé par le désir.
Alors, cédant à sa propre poussée volcanique, il la souleva dans ses bras et la jeta sur le lit.
— Maritza ! cria-t-elle.
— Oui Madame.
— Garde au chaud les piments farcis !
V
Ce n’est que le lendemain lundi à quatre heures qu’Adrien quittait le nid d’amour de la rue des Saules. Ainsi, il avait manqué la première journée de travail de la semaine.
« J’ai fait blau-Montag »[1] comme tous les ivrognes, se disait-il, employant l’expression allemande commune aux ouvriers roumains, auxquels les Allemands avaient appris
- ↑ Lundi bleu