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Du reste, j’aime assez cette « rêvasserie ». Bien qu’elle dévore des heures que je pourrais consacrer à l’étude, à la lecture.

Quel mal j’éprouve — souvent — à lire, mes distractions, mes absences, mon manque de mémoire. Si tout n’était pas foutu, j’entreprendrais de lutter. Mais le perpétuel : à quoi bon, et je me laisse emporter… encore que le courant ne m’entraîne que là où j’ai choisi d’aller (jusqu’à ce jour, du moins).

Impossibilité d’écrire, parce que ma pensée, ma vie (et tant d’autres vies) a trop de replis, trop de détours. Rien qui ne se présente simplement, franchement, totalement. Rien qui ne soit pour moi vérité absolue. Hormis, pour moi-même, ma propre vérité. (Mais comment la reconnaître, bien l’éclairer, c’est le drame.)


Eugène Dabit.



Ce sont là les dernières lignes écrites dans ce carnet par Eugène Dabit, qui devait mourir à Sébastopol neuf jours plus tard.