Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/533

Cette page n’a pas encore été corrigée

de celui qui ose immoler sur sou foyer de malheureux suppliants réfugiés dans sa maison ; qui les coupe, qui les mange, qui fait craquer leurs membres sous ses dents sacrilèges, qui fait bouillir des chairs humaines, ou les retire de dessus les charbons toutes brûlantes, pour s’en repaître !

Ulysse

[375] Ô Jupiter ! que dirai-je de l’affreux spectacle que cet antre vient de m’offrir ? Spectacle incroyable, semblable aux récits fabuleux, et non aux actions des hommes.

Le chœur

Qu’est-il arrivé, Ulysse ? Le Cyclope impie a-t-il fait un festin de tes chers compagnons ?

Ulysse

Il en a mangé deux, après les avoir bien examinés des yeux et palpés des mains, pour reconnaître la chair la plus grasse et la plus ferme[1].

Le chœur

Infortunés ! Comment leur a-t-il l’ait subir ce cruel supplice ?

Ulysse

[382] Aussitôt que nous sommes entrés dans la caverne, le Cyclope a commencé par allumer du feu, en jetant sur le large foyer les branches d’un grand chêne qui aurait fait la charge de trois chariots : ensuite il s’est fait près du feu un lit de feuilles de sapin. Il a pris un cratère de la capacité de dix amphores, s’est mis à traire ses vaches, et l’a rempli de lait. Il posa à côté une coupe de bois

  1. Virgile, Enéid., III, 623 : Vidi egomet, duo de numero quum corpora nostra, Prensa manu magna, medio resupinus in antro, Frangeret ad sagum expersa natarent Limina.