Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/347

Cette page n’a pas encore été corrigée

Arrête, Hippolyte ; ce ne sera pas impunément que le ressentiment de Vénus t’aura pris pour victime, en récompense de ta piété et de tes vertus : cette main saura punir un autre mortel qu’elle chérit entre tous, en le perçant de mes traits inévitables. Pour toi, infortuné, en dédommagement de tes souffrances, je te ferai rendre les plus grands honneurs dans la ville de Trézène. Les jeunes filles, avant d’avoir subi le joug de l’hymen, couperont leur chevelure en ton honneur, et te paieront, pendant une longue suite de siècles, un tribut de deuil et de larmes. Toujours les poétiques regrets des jeunes vierges garderont ta mémoire, et jamais l’amour de Phèdre pour toi ne tombera dans le silence et dans l’oubli. Et toi, fils du vieil Égée, prends ton fils dans tes bras, et presse-le sur ton sein ; car c’est sans le vouloir que tu l’as perdu. Il est naturel aux hommes de s’égarer, quand les dieux les y poussent. Je t’exhorte, Hippolyte, à ne point haïr ton père, car tu as une destinée qui te fait périr. Adieu ; il ne m’est pas permis de voir les morts, ou de souiller mes regards par les derniers soupirs d’un mourant ; et déjà je te vois approcher du moment fatal.

Hippolyte.

1440Toi aussi reçois mes adieux, vierge bienheureuse ; puisses-tu quitter sans peine notre longue intimité ! Je me réconcilie avec mon père, puisque tu le désires ; car jusqu’ici j’ai toujours obéi à tes ordres. Mais, hélas ! les ténèbres s’étendent sur mes yeux ; reçois-moi dans tes bras, mon père, et soutiens mon corps brisé.

Thésée.

Ah ! mon fils ! que fais-tu de ton malheureux père ?

Hippolyte.