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 d’Hector et de tant de héros ! il me contraindrait à faire le pain, à balayer la maison, à manier la navette et à passer mes jours dans la douleur ; et un vil esclave (18) souillerait ma couche, autrefois jugée digne des rois ! Non, certes ; je renonce à cette lumière, libre jusqu’au dernier moment, et j’offre mon corps à Pluton. Ulysse, conduis-moi au lieu de mon supplice : je ne vois désormais ni espoir ni chance de bonheur pour nous ! Et toi, ma mère, ne dis rien, ne fais rien pour apporter obstacle à ma résolution ; conseille-moi plutôt de mourir avant de subir des outrages indignes de ma naissance. Celui qui n’a pas l’habitude du malheur le supporte avec peine, et courbe difficilement sa tête sous le joug. La mort est alors bien préférable à la vie ; car vivre dans l’opprobre est un fardeau insupportable.

LE CHŒUR.

[379] C’est une glorieuse distinction parmi les mortels d’être issu d’un sang illustre, et le renom de la noblesse grandit encore chez ceux qui s’en montrent dignes.

HÉCUBE.

Voilà de généreuses paroles, ma fille ; mais cette générosité ajoute à ma douleur. Ah ! s’il faut satisfaire à la haine du fils de Pélée, s’il vous faut échapper à ses reproches, ô Ulysse ! n’immolez pas cette victime ; conduisez-moi sur le tombeau d’Achille, frappez, ne m’épargnez pas ; c’est moi qui ai donné le jour à Pâris, dont les flèches percèrent le fils de Thétis.

ULYSSE.

Hécube, ce n’est pas ton sang que l’ombre d’Achille demande aux Grecs ; c’est celui de ta fille.

HÉCUBE.

[391] Eh bien ! faites-moi périr avec elle ; ce sera une double