Page:Euripide - Electre, 1908, trad. Herold.djvu/57

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ORESTE.

Que veux-tu dire ? Parle et tu n’as rien à craindre.

ÉLECTRE.

Outrager les morts… si la haine allait m’atteindre.

ORESTE.

Il n’est personne, ici, qui blâme tes paroles.

ÉLECTRE, jetant au cadavre un regard furtif.

Notre ville est morose et se plaît à blâmer.

ORESTE.

Parle, si tu le veux, ma sœur ; car notre haine contre lui est soumise à des lois implacables.

ÉLECTRE.

Bien. (Au cadavre.) Par quelles injures commencerai-je ? par quelles finirai-je ? et quel sera le milieu de mon discours ? Jamais je n’ai cessé de murmurer, dès l’aube, tout ce que je voulais te dire, face à face, si, enfin j’étais délivrée des vieilles craintes : je le suis maintenant ; tu les recevras donc ces injures que je voulais te dire, à toi vivant. Tu m’as perdue et m’a faite orpheline d’un père bien-aimé, et tu as fait celui-ci orphelin, et, envers toi, nous n’avions pas été injustes ! Et tu as épousé honteusement ma mère, et tué l’homme qui commandait aux Hellènes, toi qui n’étais pas même allé chez les Phrygiens. Et tu en vins à ce point de folie, d’espérer qu’une fois ta femme, ma mère ne serait pas mauvaise envers toi, toi qui l’avais faite mauvaise envers mon père ! Qu’il le sache, l’homme qui perd une femme par un adultère secret et qui est ensuite forcé de la prendre comme épouse, est à plaindre,