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est agréable de verser cela dans une boisson plus faible. (Des paysannes ont pris les dons du vieillard, elles les portent dans la maison.) Qu’on porte tout cela aux hôtes, dans les demeures ; pour moi, avec les lambeaux de mes vêtements, je veux essuyer mes yeux, tout humides de larmes.

ÉLECTRE, descendant vers le vieillard.

Pourquoi, vieillard, as-tu les yeux mouillés ? Est-ce qu’après longtemps mes maux t’ont fait souvenir ?… ou pleures-tu le malheureux exil d’Oreste, et mon père qu’autrefois tu tenais en tes mains, et que tu élevas en vain et pour toi et pour tes amis !

LE VIEILLARD.

En vain. Et cependant je m’étais résigné. Mais, en passant, je suis allé vers son tombeau, je me suis prosterné, et j’ai pleuré, ayant autour de moi trouvé la solitude. Je déliai l’outre que je porte aux étrangers, je fis des libations et, autour du tombeau, je posai des branches de myrte. Et sur l’autel funéraire, il y avait une toison noire, une victime égorgée… je l’ai vue… et du sang versé depuis peu, et des boucles coupées d’une chevelure blonde. Et, étonné, je me demandai, mon enfant, quel homme avait osé venir vers le tombeau, car, certes, ce n’est pas quelqu’un des Argiens. Mais peut-être ton frère est-il venu secrètement, peut-être est-il allé là-bas et peut-être a-t-il honoré la pauvre tombe de son père. (Il sort de dessous sa tunique une boucle de cheveux.) Cette boucle, approche-la de tes cheveux ; la couleur de tes cheveux ne serait-elle pas la même que celle des cheveux coupés ? car souvent il arrive à ceux du même sang d’avoir le corps en bien des points semblable.