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gnements ; mais, littéralement traduits, de quel ton ils sont donnés ! L’Éternel ne parle point autrement à Moïse, ni Moïse à son peuple. Cependant il ne s’agit là que d’engrais auxiliaires auxquels leur rareté n’assigne qu’un usage très limité. Ce n’est encore que le lait et la bouillie des nouveau-nés. Mais le grand engrais, la pièce solide qui sera l’aliment des adultes, le pain des prochaines récoltes, celui que le solennel, le biblique rédacteur du Tcheou-Li entoure de toutes ses préférences, c’est l’engrais à l’égard duquel nos paysans d’Europe, nos ingénieurs et nos municipalités professent le plus d’indifférence, de mépris, de dégoût et de haine, celui qu’ils chargent de toutes nos iniquités, de toutes nos incuries et de toutes nos ignorances ; celui que nos savants défendent le moins contre un aussi inqualifiable aveuglement ; c’est l’engrais que ni les uns ni les autres n’hésiteront à conduire à la mer, dût-il en coûter des centaines et des centaines de millions, sans songer un seul instant que c’est le territoire lui-même que l’on aura déporté[1].

  1. C’est si commode de s’en prendre à quelqu’un ou à quelque chose de ses propres fautes ! Au prix de 200 millions au moins, on construira un magnifique canal qui emportera jusqu’à la Manche le produit des égouts de Paris, et l’on aura la conscience nette ! Eh bien, la question n’est pas aussi simple que cela. S’il est vrai que les produits des fosses d’aisance soient un danger pour la santé publique, c’est que nous ne savons pas ou ne pouvons pas les employer a temps. Faites que les cultivateurs se les disputent comme en Chine, faites qu’ils viennent se les arracher jusque dans nos villes, et le danger disparaîtra. Une fois en contact avec la terre et avec les plantes, il n’y a plus que des bienfaits à en attendre. Quant à moi qui ai passé dix ans en Chine, qui ai vécu pendant cinq ans au milieu de régions fertilisées par ce seul engrais, j’affirme, je jure que les seules atteintes que ma santé ait éprouvées au bout de cinq ans ne peuvent pas lui être attribuées, et que les populations chinoises sont au moins aussi saines et aussi peu sujettes aux maladies contagieuses que celles d’Europe. Puisse mon témoignage être entendu !
    Et si l’on objecte que notre état social ne permet pas de faire autrement, ce sera tant pis pour notre état social, car ce sera son […] et sa condamnation.