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Toutefois, en renonçant à une invitation que j’eusse acceptée avec empressement sans les considérations qui précèdent, je ne perdis pas l’occasion qui m’était offerte de parler à Ouang-Ming-Tse d’une question qui me préoccupait depuis le premier jour. Les jeunes filles chinoises se marient ordinairement de bonne heure ; il en est peu qui dépassent quinze ou seize ans. Siu-Lien[1] en avait près de dix-sept et n’était pas mariée. En Europe, malgré sa beauté, sa grâce touchante et ses grands yeux, noirs comme ceux de tous les habitants du Céleste Empire mais d’une expression très douce, le fait n’aurait eu rien d’étonnant. En Chine, c’était pour ainsi dire une anomalie dont les motifs intéressaient non ma curiosité, mais l’amitié sincère que m’inspirait chacun des membres de cette excellente famille. Je n’avais cependant pas osé m’en informer, parce que le sujet était délicat, et que le chapitre des femmes est un de ceux sur lesquels il est de bon ton d’observer la plus extrême réserve ; mais en félicitant le grand-père de la nouvelle qu’il venait de m’annoncer de la façon que je viens de dire, je pouvais très bien lui demander ce qui avait pu retarder le bonheur des deux jeunes gens. « Il y a, en effet, deux ans que le mariage aurait dû avoir lieu, me répondit-il. Les deux familles en étaient où elles en sont aujourd’hui. On allait s’entendre sur le choix du jour, lorsque ma petite-fille tomba malade, et elle resta longtemps faible. A peine

  1. Trad.: fleur de nymphæa fraîche éclose.