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dans les champs, sans avoir pris d’autre précaution que de nous être couverts de notre costume chinois[1]. Nous allions en flânant, nous arrêtant à chaque pas, causant avec le premier passant de la pluie, du beau temps, des récoltes et du reste. Je vois encore un certain arbre sous lequel, un jour, n’en pouvant plus de chaleur et de fatigue, nous nous étions laissés tomber. Un peu de gazon, de vrai gazon, si rare dans les campagnes chinoises où tout est cultivé, entourait ses racines et nous faisait un siège doux et frais, sur lequel nous nous étendions avec un plaisir infini. Malheureusement, nous n’avions pas remarqué, non loin de là, deux femmes un peu cachées par quelques arbrisseaux, et qui, travaillant dans un petit jardin, ne nous avaient pas non plus vus venir. Or, il faut savoir qu’il n’est pas convenable que des hommes étrangers s’arrêtent longtemps en présence des femmes. Nous savions bien que nous n’étions pas à notre place, mais comment quitter, sans regret, l’arbre qui nous abritait du soleil ? Nous essayâmes de conjurer le danger. — « Bonjour donc, les bonnes dames, dit l’interprète de sa voix la plus avenante. — Bonjour, bonjour, mais que faites-vous là ? Allez plus loin. — Cependant, mesdames, voulut-il objecter, nous sommes bien fatigués ; et, voyez, les autres arbres sont loin. — Mais quels sont donc ces barbares, reprit l’une de nos

  1. J’étais accompagné dans l’un de ces voyages par M. L. Bourret, qui avait été délégué, sur ma demande, par le commerce français de Shang-haï, afin d’étudier les produits commerciaux des provinces encore inconnues que j’allais visiter.