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Au milieu de ses angoissantes pensées, elle vint à songer au vieil archiprêtre Toussaint. Lui, si bon, si charitable, si miséricordieux pour les faibles, lui qui l’avait vue tant de fois tout enfant chez son père, il la tirerait de ce pas difficile, et elle reprit un peu de courage.

Ayant pris sa résolution, Mme Boyssier sortit dans l’après-midi et se dirigea vers la maison curiale.

— M. l’archiprêtre est là, n’est-ce pas ? dit-elle en patois à la vieille Janou, en montrant la porte de la chambre.

— Oui bien, répondit la servante ; le pauvre homme n’est pas capable d’aller courir… surtout avec cette neige.

Mme Boyssier frappa, puis entra. Le vieil archiprêtre, alors âgé de près de quatre-vingts ans, était assis au coin du foyer, dans un fauteuil de paille garni d’un coussin de plume et recouvert d’une housse d’étoffe à ramages d’un vert un peu fané. Un bonnet de soie noire, sous lequel passaient des mèches blanches, couvrait sa tête. Il était vêtu d’une sorte de houppelande brune dans laquelle flottait son corps frêle, et ses jambes étaient couvertes d’une vieille couverture de Catalogne. En voyant ouvrir la porte, le vieillard tourna la tête, mouvement faiblement imité par son carlin « Finaud », qui, fatigué par cet effort, replaça son museau noir et camus sur ses pattes allongées.

— Hé ! c’est toi Pimpette ! dit-il en patois, en lui donnant son petit nom d’enfance, prends une chaise et mets-toi là.

« Et quel bon vent t’amène par ce mauvais temps ? » fit-il après les demandes sur le « portage », lorsqu’elle fut assise.

— J’ai bien des choses à vous dire ! fit-elle tristement.