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IV


Deux ans après sa venue à Fontagnac, Damase était un homme, Il était grand et robuste ; sa taille souple, ses épaules larges, donnaient l’impression de la force jointe à la grâce. Un soupçon de moustache ombrait sa lèvre ; il portait bien la tête, ses cheveux, d’un blond doré, retombaient bouclés sur son cou bien musclé, et sa voix avait pris la chaude sonorité de l’âge viril. Au moral, son esprit s’était formé, son caractère s’était assuré. Il avait travaillé avec ardeur pendant ces deux années et passé bien des nuits à étudier. Dans les commencements, les passants attardés, voyant la fenêtre de sa mansarde éclairée, se demandaient s’il n’y avait pas quelqu’un de malade chez le notaire.

Mais bientôt on avait su que Damase étudiait la nuit, et l’impression générale avait été que Mme  Boyssier était bien bonne de lui laisser brûler tant de chandelle. Ses progrès étaient surprenants, et, maintenant, il travaillait souvent à l’étude, écrivant des actes sous la dictée du patron et faisant des expéditions. Ses sentiments pour Mlle  de La Ralphie n’avaient pas changé ; c’était toujours le même dévouement pur et naïf, rendu plus tendre par les émotions de la puberté. Souvent, il se prenait à regarder les murs du couvent et la revoyait par la pensée devenue plus belle dans sa gravité de fillette. Valérie était alors dans sa quinzième année et elle était déjà grande et bien formée. Sa poitrine se développait, ses