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— Ne pourrait-on pas la placer dans de meilleures conditions matérielles ? demanda M. de Massaut.

— Nous l’y avons mise plusieurs fois, mais la difficulté est de l’y maintenir, répondit le directeur. Elle se salit comme à plaisir. Il y a deux jours, ses fournitures de coucher ont été renouvelées, et vous avez vu comment elle a tout déchiqueté des ongles et des dents. Elle a la rage de la destruction, et puis elle est très dangereuse. Cette Géraude peut seule l’approcher, et encore seulement dans ses moments de calme relatif, très rares. Pour la tenir propre et la rendre inoffensive, il faudrait lui mettre la camisole de force et l’attacher dans un lit, ce qui exaspérerait sa folie… et puis, à quoi bon ? Elle n’a plus la notion du bien ou du mal être, encore moins de la propreté ; elle n’a conscience de rien, l’être moral n’existe plus.

— Sa folie est incurable, je suppose ? demanda le vicomte.

— Oui, absolument. D’ailleurs, elle ne mange ni ne dort ; la vie organique ne peut persister longtemps dans ces conditions. Quelque jour, d’ici peu, elle passera dans une crise.

— Quelle terrible fin !

En s’en retournant, accoté dans le landau qui l’avait amené de Figeac, tandis que le cocher sur son siège, sifflait l’air du Pied qui r’mue, le vicomte de Massaut songeait à la triste destinée de Valérie de La Ralphie. Il la revoyait en pensée, suivant la procession de la Fête-Dieu, à Fontagnac, vêtue de blanc, belle dans la gracieuse éclosion de sa puberté précoce, et d’un charme troublant déjà qui contrastait avec ce vêtement virginal. Puis il se remémora le temps où il passait dans la rue de la Barbe-