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seins, pareils à deux outres vides, pendaient jusqu’à la ceinture, et, dans l’état d’épouvantable maigreur où elle était, le squelette, avec tous ses os, apparaissait flottant dans une peau trop large qui retombait en plis rugueux. Le corps, plein de hideuses callosités et de plaques squameuses, portait des traces de souillures récentes.

M. de Massaut se recula vivement en voyant la folle s’élancer vers la grille, et, de son bras passé entre les barreaux, chercher à le saisir en grognant des sons inintelligibles que son attitude et ses gestes commentaient obscurément. Plus une lueur d’intelligence, aucun reste de spiritualité ne survivaient dans cet être dégradé, réduit à une animalité inférieure aggravée par des habitudes horribles.

— Quelle est cette malheureuse ? demanda le sous-préfet.

— C’est une fille riche et de bonne maison, répondit le docteur, une demoiselle de La Ralphie.

— Est-ce possible ! s’écria M. de Massaut.

Et il s’éloigna saisi d’horreur, tandis que la démente, cramponnée aux barreaux, les secouait dans un accès de frénésie affreuse à voir.

— Vous avez connu cette malade, Monsieur le sous-préfet ? demanda le directeur, lorsqu’ils furent dehors.

— Oui… Et j’ai peine à croire que ce soit là cette magnifique créature que j’ai vue autrefois.

Et, brièvement, il raconta au directeur l’histoire de Mlle  de La Ralphie.

— Avec le tempérament de cette femme, dit le directeur, il n’est pas étonnant que le célibat l’ait rendue folle. Il lui a fallu, d’ailleurs, une rare force de volonté pour se contenir ainsi pendant des années.