Page:Eugène Le Roy - Mademoiselle de la Ralphie, 1921.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dans l’après-midi de ce jour-là, étant sortie à cheval et s’en allant au hasard, selon sa coutume, Mlle  de La Ralphie se trouva sur un haut puy couvert d’yeuses, tout au point culminant d’une petite chaîne de collines d’où l’on découvrait la vallée de la Vézère et la belle rivière qui brillait au soleil comme une immense coulée d’étain fondu. Sur la rive droite, pareil à une gigantesque chaire à prêcher, elle apercevait le rocher de Guersac se détachant des escarpements voisins, et, en remontant, dans l’éloignement, un amas de vapeurs flottantes indiquait la petite ville de Fontagnac.

Ce que lui avait dit la Martille lui revint à l’esprit. Devant ses prunelles hypnotisées, se dressait dans toute la superbité de sa mâle beauté, l’image du vicaire. Avec « Kébir » en trois heures, elle serait là-bas, dans la rue de la Barbecane et le ferait appeler par la Faurille… Et, penchée sur la selle, comme irrésistiblement attirée, involontairement elle porta son cheval en avant…

Au bout de quelques minutes, cette griserie se dissipa et sa volonté reprit le dessus. Elle s’arrêta brusquement, tourna bride et revint à Canteloube.

— La première fois que tu iras à Guersac, fit-elle à la Martille, il faudra dire à Mérical de venir chercher « Kébir ».

La chambrière comprit que sa maîtresse se défiait de ses propres forces et se mettait dans l’impossibilité de céder à un entraînement passager.

Pour la Géraude, elle n’était pas capable de beaucoup de réflexion, et vit partir le cheval sans se demander pourquoi. Cette fille robuste, taillée comme une hache, forte comme un homme, qui, à coups de quenouille, avait plus d’une fois disputé ses