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vaillants sauveteurs entrent dans les flammes, au péril de leur vie, de même je suis prêt, pour vous sauver, à me précipiter dans le feu dévorant, dussé-je m’y perdre moi-même. »

C’était assez clair ; aussi Mlle de La Ralphie fut-elle violemment remuée par cette phrase du vicaire qui se mettait à sa merci. Elle resta un moment immobile, renversée dans un fauteuil, la lettre sur ses genoux : un signe et il accourait !… Mais ce mélange de religion, d’intérêts matériels et d’amour la dégoûtait ; ce langage hypocrite, ces phrases à double sens, cette combinaison mercantile lui faisaient horreur. Et puis, elle sentait invinciblement que sa fantaisie serait de courte durée ; après quoi, le plaisir lui étant devenu indispensable, elle passerait à un autre, puis à un autre encore… Un grain d’idéal, dans le sentiment qui la poussait vers le vicaire, et elle succombait peut-être ; si même il eût été présent, la passion l’eût emporté ; mais, consentir de propos délibéré, au vice brutal, cela la révoltait : elle recula devant ce terrible engrenage où la chute engendrait une nouvelle chute.

Valérie se leva, froissa la lettre dans ses mains et la jeta au feu, bien résolue à oublier l’abbé Sagnol.

Grâce à cette lettre qui lui répugnait, à sa fière volonté, au temps qui détruit tout, Mlle de La Ralphie se tint parole et le souvenir du vicaire s’affaiblissait progressivement dans son esprit. Elle fut heureuse de ce résultat et crut avoir vaincu définitivement, mais ses ardeurs héréditaires de sang ne tardèrent pas à la tourmenter et à réveiller en elle des passions un instant apaisées.

Quelques mois après, pendant qu’elle luttait courageusement et que l’abbé Sagnol se rongeait les ongles et maudissait sa timidité qui lui avait fait