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ailleurs. En ce moment, elle sentait la justesse des prévisions du défunt commandeur et vérifiait, par sa propre expérience, que, comme il le lui avait dit, le monde est impitoyable pour ceux qui ne cachent pas leurs fautes sous une habile hypocrisie. Toutefois, elle ne regrettait pas la franchise de sa conduite, car elle méprisait l’opinion de cet Anatole qu’elle avait cravaché, de ces bourgeois stupides du Cercle, de toutes ces caillettes, de ces pécores de la bonne société de Fontagnac, qui, tous et toutes, l’eussent très fort honorée et courtisée si elle eût daigné seulement sauver les apparences.

Elle souriait ironiquement en se disant cela, ayant conscience de valoir mieux que tous ces vilains bonshommes mâles et femelles ; d’être plus honnête dans l’effervescence de son tempérament que la bégueule Mme  Renac, en relations adultères, avec Anatole ; que Mme  Laugerie, cette virago vouée aux éducations de jouvenceaux ; que la bigote Mme  Decoureau, jadis adonnée spécialement à la gent ecclésiastique ; que cette mijaurée de Mme  Delfand, la femme de l’ex-procureur du roi, en affaire réglée avec un ami de la maison surnommé plaisamment, à cause de cela, « le substitut » ; que Mme  de Tibal-Castagnère, veuve de quarante-cinq ans, qui concubinait avec le capitaine Gillerac ; et que tant d’autres qui affectaient, comme celles-ci, une pruderie risible et des airs pincés ridicules.

Le lendemain, par une sorte de bravade qui était dans son caractère, Mlle  de La Ralphie prit le chemin de Fontagnac. Elle voulait constater une fois de plus, la platitude de tous ces faquins qui la déchiraient et leur montrer, par son attitude, que leur opinion lui était indifférente. Il faisait un beau temps ; le soleil ardent était tempéré par une