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ressenti ni vu une vive contrition d’une faute que son expérience jugeait inséparable de la fragilité humaine, comme celle que faisait paraître l’abbé pour un péché d’intention.

Et, souriant, après avoir rassuré, consolé son pénitent et lui avoir donné l’absolution sacramentelle, le bon curé se leva et ils allèrent au jardin. En passant devant la cuisine, le vieillard appela :

— Jeannille, dit-il, fais-nous quelque chose, M. l’abbé reste à souper.

— C’est bien le moment de le dire ! s’écria en patois la servante, avec une liberté autorisée par vingt ans de services ; et que voulez-vous que je fasse, à cette heure ?

— Bah ! riposta le curé sans s’émouvoir, il y a du confit dans les pots, arrange une aile de dinde : en saupiquet, tue un poulet, fais une omelette aux artichauts, il y a des fraises ; avec ça, nous souperons aussi bien que Monseigneur… Tu as deux bonnes heures devant toi.

La Jeannille sortit en grommelant et fit passer un mauvais quart d’heure à un pauvre poulet qui n’en pouvait mais.

Ils se promenèrent dans le jardin en attendant. Le curé montra au vicaire son carreau d’asperges, des pommes de terre précoces, obtenues à force de soins, et surtout une planche de la fraise « curé de Gayac », due à de savantes sélections. Après avoir fait les honneurs de son jardin, avoir fait admirer à son hôte ses arbres fruitiers, un à un, et lui avoir fait faire les cent pas sous une belle treille de chasselas, le curé le mena visiter l’église. C’était une petite église de campagne, blanchie à la chaux, pauvre, mais propre et riante. Leur oraison faite, après avoir examiné longuement la pierre sacrée