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à l’heure de la messe, monta et n’eut pas de peine à le croire malade, en le voyant pâle, fiévreux et les yeux cernés par l’insomnie. L’abbé Sagnol resta couché toute la matinée, ne déjeuna pas, et, dans l’après-midi, sortit, son bréviaire des dimanches. sous le bras. L’idée lui était venue d’aller trouver le vieux curé de Gayac et de lui avouer sa coulpe.

Lorsque après une heure de marche, il arriva au presbytère, le curé était en train de sarcler ses choux. L’abbé se sentit rassuré en le voyant, et, en effet, le vieux prêtre, en pantalon de toile, la soutane retroussée, un mauvais chapeau de paille sur la tête, n’avait pas l’air d’un juge bien redoutable, surtout avec le large sourire qui éclaira sa bonne figure en souhaitant la bienvenue à son jeune confrère. Le curé laissa retomber sa soutane, accrocha son chapeau à une branche et ils entrèrent dans le « salon à manger », comme on dit en Périgord, où, jadis, dans la bourgeoisie campagnarde, on ne recevait de visites qu’à table. Le vieillard ne se fut pas plutôt assis dans un fauteuil paillé en invitant l’abbé à en faire autant, que celui-ci se mit à ses genoux. Surpris, le curé alla pousser la targette de la porte.

— Je vous supplie de m’entendre en confession, dit le vicaire, lorsque le bonhomme eut repris sa place.

Et, après les préliminaires rituels, il commença par l’exposition de ses projets de conversion et de fondation pieuse ; puis raconta avec force détails comment le démon s’était servi de ces motifs louables pour l’induire en péché. À mesure qu’il parlait, s’accusant avec ferveur et entrecoupant ses aveux de soupirs pénitents, un profond étonnement se peignait sur le visage du confesseur. Certes, lui-même était tombé jadis, et il avait reçu les confidences de plusieurs de ses confrères tombés aussi ; mais jamais il n’avait